Jet ski, responsabilité et indemnisation

 In Réparation du dommage corporel

En ce début d’été, lors d’EVG / EVJF ou de vacances, vous aurez peut-être l’occasion de pratiquer le jet ski ou scooter des mers.

Ludique et de plus en plus accessible, la pratique n’est toutefois pas sans risque et chaque année des collisions, chutes et noyades sont recensées.

Plusieurs dossiers en cours au Cabinet nous rappellent cette réalité. A chaque fois, l’hypothèse de départ est identique : un weekend ensoleillé sur la côte atlantique, des amis qui réservent une excursion et l’un d’eux est blessé (chute en qualité de passager ou collision à l’origine de fractures), hospitalisation, arrêt de travail, etc. voire amitié gâchée, séquelles et procès.

Cet article a vocation à vous aider dans vos démarches en cas d’accident et à dresser un état des démarches à entreprendre.

Ne sera abordée ici que l’activité organisée et encadrée, sous la forme d’une excursion.

En cas de simple location d’un jet ski, en l’absence de tiers impliqué – sauf hypothèse d’une défaillance du scooter – le locataire est le seul responsable de son dommage : au-delà de toutes les règles de prudence liées à la navigation, il faut vérifier vos contrats d’assurance personnel / emprunteur afin d‘être certain d’être couvert en cas de problème (certaines compagnies excluent les sports nautiques de leur garantie).

I – L’ACCIDENT CAUSE PAR UNE AUTRE PERSONNE

 

A – L’abordage

L’abordage est le choc de deux navires et est assimilé au navire, ou au bateau, tout engin flottant non amarré à poste fixe.

L’article L. 5131-1 du Code des transports énonce que « Pour l’application des dispositions du présent chapitre, est assimilé au navire, ou au bateau, tout engin flottant, y compris les drones maritimes, non amarré à poste fixe ».

Dès lors, les règles du Code des transports, notamment celles concernant l’abordage, s’appliquent au jet ski, comme cela a été confirmé par la Cour de cassation dans un arrêt du 03 juillet 2012.

Ces règles sont territoriales, elles ne s’appliquent qu’aux accidents survenus dans les eaux françaises, pour plus de précisions, voir les développements relatifs à l’accident à l’étranger en bas de cet article.

La responsabilité en cas d’abordage est prévue par les articles L. 5131-3 et L. 5131-4 du Code des transports :

« Si l’abordage est causé par la faute de l’un des navires, la réparation des dommages incombe à celui qui l’a commise.

Si l’abordage est fortuit, s’il est dû à un cas de force majeure ou s’il y a doute sur les causes de l’accident, les dommages sont supportés par ceux qui les ont éprouvés, sans distinguer le cas où soit les navires, soit l’un d’eux, étaient au mouillage au moment de l’abordage.

« S’il y a faute commune, la responsabilité de chacun est proportionnelle à la gravité des fautes respectivement commises. Toutefois, si, d’après les circonstances, la proportion ne peut être établie ou si les fautes apparaissent comme équivalentes, la responsabilité est partagée par parties égales.

Les dommages causés soit aux navires, soit à leur cargaison, soit aux effets ou autres biens des équipages, des passagers ou autres personnes se trouvant à bord, sont supportés par les navires en faute, dans cette proportion, sans solidarité à l’égard des tiers.
Les navires en faute sont tenus solidairement à l’égard des tiers, pour les dommages causés par mort ou blessures, sauf recours de celui qui a payé une part supérieure à celle qu’il doit définitivement supporter, conformément aux dispositions du deuxième alinéa ».

En résumé :

  • Si un seul navire a commis une faute, la victime non fautive est indemnisée,
  • Si aucun navire n’a commis de faute, la victime n’est pas indemnisée,
  • Si les deux navires ont commis une faute, la victime est partiellement indemnisée.

La prescription (délai pour engager une action en justice) est très courte puisqu’elle est de deux ans à compter de l’abordage en application de l’article L. 5131-6 du Code des transports : il faut donc consulter un Avocat spécialisé sans tarder !

B – Les manœuvres

Même en l’absence de collision, le régime juridique de l’abordage peut s’appliquer lorsqu’un navire a causé des dommages par exécution ou omission de manœuvre, ou bien par inobservation des règlements de navigation.

L’article L. 5131-7 du Code des transports prévoit :

« Les dispositions du présent chapitre sont applicables à la réparation des dommages qu’un navire a causés, soit par exécution ou omission de manœuvre, soit par inobservation des règlements, à un autre navire, ou aux personnes ou aux choses se trouvant à leur bord, alors même qu’il n’y aurait pas eu abordage. »

Le cas échéant, la responsabilité civile de droit commun s’applique.

C – La responsabilité civile générale

En cas d’accident impliquant une autre personne et hors cas précité, la responsabilité personne de droit commun (articles 1240 et 1241 du Code civil) s’applique : il faut démontrer une faute de la part du pilote du jet ski à l’origine de l’accident ce qui n’est pas toujours facile compte tenu des circonstances (accident en mer, souvent dans un laps de temps très court avec des pilotes pas / peu expérimentés).

La responsabilité du fait des choses, prévue à l’article 1242 du Code civil, peut également s’appliquer en s’intéressant cette fois non pas aux actes du pilote mais au fait que le jet ski a été l’instrument du dommage.

Dans la pratique, la responsabilité du fait des choses est soumise à un régime plus avantageux pour la victime. En effet, il s’agit d’une responsabilité sans faute (l’auteur du dommage peut voir sa responsabilité engagée alors même qu’il a été prudent), et de plein droit : dès lors que la victime (tiers ou passager du jet ski) rapporte la preuve que son dommage a été causé par une chose, le gardien (le pilote du jet ski est considéré être son gardien) de cette chose voit sa responsabilité engagée.

Le délai pour agir est alors de 10 ans à compter de l’accident de jet ski ou, en cas de blessures, à compter de la consolidation (date à partir de laquelle l’état de santé est stabilisé, avec ou sans séquelles).

La faute du tiers est appréciée en fonction du comportent attendu d’une personne prudente et avisée.

Ce qu’il faut retenir :

  • Les régimes de responsabilité sont complexes, le délai pour agir est court,
  • Toutes les assurances responsabilité civile ne couvrent pas les dommages causés lors d’une activité nautique comme le jet ski : les conséquences peuvent être dramatiques puisque le responsable paiera pendant des années des indemnités / la victime ne sera pas indemnisée si le responsable est insolvable.

Il faut donc souvent engager la responsabilité de l’organisateur de l’excursion pour espérer une indemnisation.

 

II – LA RESPONSABILITE DE L’ORGANISATEUR DE L’EXCURSION

 

L’organisateur de l’excursion pourra être responsable, lorsque l’accident a été causé par une personne ou que la victime s’est blessée seule.

Les entreprises de location de jet ski sont débitrices d’une obligation de sécurité envers les locataires. Cette obligation a été codifiée à l’article L. 421-3 du Code de la consommation

« Les produits et les services doivent présenter, dans des conditions normales d’utilisation ou dans d’autres conditions raisonnablement prévisibles par le professionnel, la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre et ne pas porter atteinte à la santé des personnes ».

L’obligation de sécurité est une création ancienne de la Cour de cassation, en résumé elle impose à celui qui délivre une prestation (en l’occurrence l’excursion), de prendre les mesures nécessaires pour que les participants ne subissent pas de dommages (blessures ou dégâts matériels).

La jurisprudence distingue l’obligation de résultat (si la victime est blessée, l’organisateur est responsable) de l’obligation de moyen (la victime est blessée et l’organisateur n’a pas suffisamment fait pour la protéger).

La responsabilité de l’organisateur de l’excursion est fondée sur une obligation de moyens : le client de l’entreprise qui aura été blessé lors de l’activité devra démontrer que le professionnel n’a pas mis en œuvre tous les moyens possibles pour l’éviter.

Pour rapporter cette preuve, il faudra notamment démontrer que les consignes de sécurité n’ont pas été énoncées / suffisamment ou correctement rappelées, que le fonctionnement du jet ski n’a pas été montré et expliqué, que l’encadrement était insuffisant (personnel pas assez nombreux, pas ou mal formé), que les conditions météorologiques devaient conduire à différer l’excursion …

Les règles du Code de la consommation n’excluent pas l’application du droit commun de la responsabilité civile contractuelles, l’article 1231-1 du Code civil énonce :

« Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure ».

Cette responsabilité étant contractuelle, elle ne pourra être engagée que par les participants à l’excursion.

Les clauses contractuelles qui écarteraient cette responsabilité ou la limiteraient sont abusives au regard du droit de la consommation, il ne faut donc pas se laisser abuser par telle ou telle mention favorable à l’organisateur dans le contrat qui réduirait l’indemnisation.

Ce qu’il faut retenir :

  • L’organisateur de l’excursion est nécessairement assuré, son assureur est par principe solvable et la victime pourra être indemnisée,
  • L’organisateur de l’excursion et son assureur vont quasi systématiquement contester leur responsabilité, affirmer que la victime est responsable de ses blessures, prétendre que le contrat exonère le professionnel de sa responsabilité :  il ne faut pas vous laisser faire.

 

III – L’ACCIDENT SURVENU A L’ETRANGER

Les régimes de responsabilité et d’indemnisation sont territoriaux.

Autrement dit, les développements précédents ne s’appliquent qu’en présence d’un accident survenu en France et, lorsque l’accident a lieu à l’étranger, le droit local s’applique, devant les tribunaux locaux : la victime d’un accident de jet ski à Ibiza ou Phuket risque d’avoir les plus vives difficultés à être indemnisées (professionnel parfois non assuré, système juridique complexe pour un touriste étranger).

Jet Ski aux Maldives

Jet Ski aux Maldives

La prudence commande évidemment de vérifier ses contrats d’assurance avant de partir :

  • RC (responsabilité civile) familiale (souvent couplée à l’assurance habitation) pour les dommages que vous pourriez causer,
  • Garantie des accidents de la vie, pour les dommages que vous pourriez subir,
  • Carte bancaire dite premium pour les dommages causés / subis (penser à vérifier qui sont les personnes couvertes – souvent la famille restreinte et non les amis – et si l’activité doit être réglée avec la carte).

Il faut notamment s’assurer que les sports nautiques comme le jet ski sont couverts, le cas échéant une extension de la garantie est toujours possible

Dans le cadre d’un voyage organisé (type vol et hôtel club), il est parfois possible d’engager la responsabilité du voyagiste puisque l’article L 211-16 du Code du tourisme prévoit :

« I.-Le professionnel qui vend un forfait touristique mentionné au 1° du I de l’article L. 211-1 est responsable de plein droit de l’exécution des services prévus par ce contrat, que ces services soient exécutés par lui-même ou par d’autres prestataires de services de voyage, sans préjudice de son droit de recours contre ceux-ci ».

Il ne faut pas non plus négliger la responsabilité pénale de l’organisateur de l’activité  / du pilote de jet ski et plus généralement de toute personne impliquée dans l’accident et déposer immédiatement une plainte auprès de la police locale, notamment en cas de décès ou blessures importantes.

En effet, une personne résidant habituellement en France et victime d’une infraction à l’étranger peut, dans certains cas, être indemnisée par le Fonds de garantie.

Là encore, les démarches seront complexes, il faudra notamment récupérer la procédure pénale étrangère avec l’aide de l’autorité consulaire, faire traduire les pièces … rien qui ne soit impossible pour un Avocat spécialisé en dommage corporel.

* * *

Loin d’être anecdotiques, les accidents de jet ski peuvent être d’une extrême gravité.

La tâche peut s’avérer fastidieuse mais l’identification des personnes responsables et l’engagement de leur responsabilité est un préalable nécessaire pour obtenir réparation du dommage subi.

Le processus d’indemnisation est souvent long et complexe, il nécessite des démarches administratives, médicales et judiciaires et seul un Avocat diplômé en dommage corporel est à même d’offrir à la victime la légitime indemnisation de ses préjudices en préparant son dossier, l’assistant lors de l’expertise, négociant avec l’assureur et plaidant devant les tribunaux.

C’est pourquoi le Cabinet AVOCATLANTIC offre un premier contact libre et gratuit, lequel vous permet d’être informé sur vos droits, de comprendre les différentes étapes de l’indemnisation et de convenir des conditions de notre intervention à vos côtés et dans votre intérêt.

Nous restons à votre disposition pour vous conseiller et vous aider dans la constitution de votre dossier.

CE QU’IL FAUT RETENIR

  1. En cas d’accident, il faut immédiatement (si possible) prendre des photographies, relever l’identité des témoins et leurs coordonnées, reprendre ses contrats d’assurance (carte bancaire, assurance garantie des accidents de la vie et déclarer un sinistre),
  2. A l’étranger, envisager un dépôt de plainte immédiat en cas de décès ou blessures graves,

Prendre contact avec un Avocat spécialisé en dommage corporel qui étudiera la situation et identifiera le moyen juridique d’obtenir une indemnisation.

Etienne BOITTIN – Avocat associé – Spécialiste en droit du dommage corporel

Liam DAVID — Etudiant à Nantes Université